Voici une occasion pour un lecteur français de faire connaissance avec la poésie de langue yiddish, image d’un certain monde juif et en même temps reflet des préoccupations plus universelles. Jacob Glatstein offre une porte qui ouvre à la fois sur les deux poésies yiddish : celle d’avant et celle d’après la Shoah. On pourrait imaginer qu’il est pour la poésie yiddish ce que I. B. Singer a été pour le roman : l’évocateur, le créateur d’un monde particulier. Né en Pologne en 1896, il est mort à New York en 1971. Ses écrits des années vingt et trente sont à l’image de la poésie européenne de cette période, dont les courants lui sont familiers ; en même temps ils présentent des thèmes et des préoccupations spécifiquement juifs de l’époque, sans verser dans un folklore désuet.
Ce qu’il écrit après la destruction du judaïsme européen a une autre tonalité, dramatique et funèbre. Jacob Glatstein a créé là un ensemble d’une grande sobriété et d’une grande force. La traduction a réussi à garder la saveur et la puissance de l’original.